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Ca-mille et une vie
9 mai 2014

Her

Her : un film sur un homme amoureux de son téléphone. Ca ne pourrait ne pas faire rêver et pourtant une belle histoire est contée. 

Ci dessous : une critique poussée et juste de cinoche. Pour moi je retiens les couleurs acidulés. La solitude des hommes et cette quête de joie et de bonheur qui nous anime tous. 

Se laisser aller. Nous méritons tous d'être heureux et peu importe par quoi ou comment se bonheur passe. Peu importe les codes, le lâcher prise doit pré valoir avant tout.

 

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"Une ouverture en forme de dissection, celle d’un visage, d’un homme. Moustachu, hagard et distant, Theodore (Joaquin Phoenix) lit ce qui semble être une lettre ou un poème en prose, rédigé dans un style extrêmement naïf. On y découvre alors que ce regard perdu, cette diction robotique est celle de l’équivalent futur du copiste, via un site – beautiful-handwritten-letters.com – qui se charge de rédiger et de “manuscrire” par procuration des lettres adressées aux proches de ses clients. L’horizon temporelle du film semble voisine de la nôtre, mais certains détails le distinguent de notre quotidien : ici la voix est le moteur de l’action, le clavier a disparu ; l’écrit devient la finalité, la plume le témoignage de la sincérité, alors même que ce sont les mots d’un autre que l’écran retranscrit à mesure de la dictée. Là réside toute la révolution de Jonze : si l’écran est permanent, la voix devient l’outil de prédilection. Plus engageante et personnelle que le clavier tactile, elle est au cœur d’un futur marqué par l’hyper-communication, une époque qui a abandonné les smartphones au profit des oreillettes. La technologie a supprimé les intermédiaires parasites et accompagne les gestes quotidiens tels qu’allumer une lampe : la connexion allège les contraintes du présent. L’univers architectural sans identité, où les grandes tours se prolongent par de vastes ponts circulaires, tranche nettement avec la chaleur des intérieurs. Dans une palette rougeoyante, l’humain est toujours au centre ; la technologie reste alors à son service avec une remarquable docilité. La voix guide de multiples usages et, ce faisant, nie la corporalité. En effet, jamais la distance entre les hommes n’a semblé plus grande : la masse informe de la foule, telle que généralement représentée, se transforme en une ribambelle d’âmes solitaires en constante communication.

L’arrivée du premier OS (operating system) intelligent a donc tout l’air d’un accessoire de plus dans cette société de l’incessante mise à jour. C’est ici que Theodore, en instance de divorce, rencontre Samantha (Scarlett Johansson), OS de son état. L’histoire d’amour qui en résulte intervient comme une parenthèse enchantée dans sa vie polie. La voix sensuelle de Samantha fait graviter autour d’elle un dispositif déconcertant, à la fois proche de nous, de ce monde dont nous maîtrisons les codes, et lointain, dans la projection d’une sentimentalité qui nous relierait à l’outil.

Jonze prend une position audacieuse qu’il extrait l’essence même du rapport humain à la technologie. Le cinéma a déjà cent fois lié l’homme à la machine, le plus souvent pour mieux les opposer, l’un prenant le contrôle de l’autre afin de le détruire. Cette posture (le plus souvent) technophobe, Jonze en prend le contrepied et s’affranchit de ses codes : la machine n’est pas pour l’homme un loup plus vil qu’il ne l’était déjà pour lui-même.

La machine (Sam) nous est présentée comme intuitive et, capable d’absorber des ouvrages complets en quelques centièmes de secondes. Sa particularité première est d’avoir pourtant, sans consigne préalable, une capacité d’initiative – celle-là même dont Theodore semble bien privé, pris dans sa solitude dans cette société. A mesure qu’elle lit ou apprend des humains, cette voix omnisciente s’interroge sur sa matérialité, sa corporalité ; elle se dote également de sensibilité. Là encore, Jonze apporte un contrepoint à l’idée reçue selon laquelle l’accumulation de connaissances accroît la distance au monde et au sentiment.

Hypermnésique, Sam se pose les questions que Theodore devrait se poser ; en se rendant capable de se penser dans son rapport au monde, elle devient plus humaine encore que lui, le fascine, et vient justifier le titre même du film - Her. Her est ainsi un film de fantômes où le spectre est finalement bien moins Samantha non-visible que Theodore mentalement absent. D’une certaine manière, ce dernier tombe amoureux d’un humain. Représentant, par son métier, l’un des derniers intermédiaires d’une société en crise de parole, Theodore se libère par l’intermédiaire de la nature.

D’autre part, la dimension circulaire des plans et des espaces peut s’interpréter comme le miroir du dépérissement du héros, qui cherche à tout prix une porte de sortie. Theodore semble la trouver au contact d’une machine qui, en définitive, le rapprochera de l’humain. Si la technologie évolue toujours plus vite que l’homme, lent, sourdement incapable de se relever d’une rupture, ce décalage génère une fascination sans mesure pour Sam. Elle incarne ce que Theodore n’est plus à même d’être ou de faire : il est un fantôme, amoureux de la chose la plus proche, dans son quotidien, de l’idée d’humanité.

Étonnamment, Jonze ne délaisse pas l’acte sexuel au moment de s’interroger sur cet amour improbable et ses difficultés. La simulation des actes sexuels, motivés par la voix, renvoie presque à une consommation pornographique où l’audio a remplacé la vidéo, écho singulier à l’ère du téléphone rose. Là encore, Jonze se garde de juger pour se border dans une empathie caractérisée, qui vise à “normaliser” ces rapports; c’est pourquoi il abandonne le spectateur à l’interprétation. Autre scène ambivalente : celle montrant une femme venue “intégrer” la romance par l’intermédiaire de l’acte sexuel – là encore le sentiment désarme et rend toute construction impossible; il s’agit de se glisser dans les relations. Ce désir accompli de présence physique pour Sam provoque cette fois-ci un malaise, avant de devenir plus ou moins acceptable pour Theodore qui se laisse prendre au jeu. Un détail va pourtant provoquer le rejet ultime par Theodore de cet acte purement physique, qu’il met sur le compte d’une lèvre tremblante. Loin de marquer pour Jonze la limite de l’acceptable moralement, ce rejet traduit simplement l’impossibilité de l’erreur, de l’acte manqué, ce que vient confirmer l’auto-flagellation de la nouvelle venue.

La présence absolue du personnage de Theodore amène un désir d’illustration de sa vie passée, qui pourrait intensifier la rupture avec le présent – dès lors les travers de Jonze, à savoir musique maussade et, bien qu’aérienne, d’une pesanteur absolue (interprétée par Arcade Fire), aspect clipesque des flashbacks, etc. révèlent la permanence d’une mélancolie sourde, qui ne cherche que rarement à se libérer du larmoyant. Le dialogue des flashbacks, moments fantasmés d’un bonheur absolu, aurait pu ouvrir un chantier autour de la sélectivité de la mémoire – intellectuelle comme sensorielle.
Her portrait de l’impuissance, s’avère un film si riche, et dense, à la réflexion philosophique si ramifiée qu’il serait dommage de se laisser abuser par ses défauts de mise en scène.

À la fin du film, la libération de Theodore intervient : les machines font sécession, les intelligences artificielles se sabordent elles-mêmes . Si l’initiative est toujours dans le camp virtuel, l’homme se retrouve désormais maître de son destin, muni d’armes antiques (le livre papier). À la fois film de solitude, de fantômes et de machines, Her est surtout un fabuleux portrait de réincarnation."

 

 

 

 

 

 

Pour moi :

 

Les deux dernières images font partie de ma philisophie personnelle.

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